Airbnb, eldorado réglementé

Si Airbnb enflamme le marché des locations temporaires depuis quelques années, cette tendance, désormais installée, s’accompagne souvent de surprises légales tant pour les propriétaires que pour les locataires qui sous-louent leur bien.

En effet, il est juridiquement important de distinguer les locations temporaires classiques de celle contractées via des plateformes d’économie collaborative comme Airbnb.

Pour cette seconde option l’essentielle différence réside dans le fait que le bien est littéralement soustrait du marché ordinaire de la location, et change ainsi d’affectation. À Lausanne, plus de 3500 logements sont concernés par ces nouvelles plateformes.

Comment ça marche ?

Dans le canton de Vaud, le Conseil d’État a réagi à la croissance des plateformes d’économie collaborative qui listent les biens disponibles sur le canton.

Afin de mieux les réguler, il demande aujourd’hui de se déclarer auprès des autorités de la commune, où se trouve le bien loué.

Elles tiennent ainsi un registre à jour qui va permettre de vérifier la limite fixée à 90 jours par an. Ce nombre correspond d’une part environ à la durée des vacances scolaires, et d’autre part, à celle d’un visa touristique. Passé ce délai, il sera obligatoire de demander une autorisation supplémentaire, ainsi que de déclarer son activité au canton, à la division logement.

Locataires bailleurs, quelques règles à respecter

À condition d’être conforme au droit du bail, la sous-location conventionnelle peut s’appliquer à son logement, en partie ou dans sa totalité. En effet, la Fédération romande immobilière (FRI) juge légitime qu’un locataire qui quitte son logement pour une courte durée, pour un séjour à l’étranger par exemple, doit pouvoir y revenir sans complication.

Dans ce cas, seul le bénéfice du locataire, désormais bailleur, doit être annoncé. Par ailleurs, il ne peut en aucun cas excéder 20%.

Taxes de séjour et déclaration fiscale

Avec Airbnb, rien n’est aussi simple, car un autre régime s’applique. D’une part, l’argent généré par cette plateforme d’économie collaborative est soumis à l’impôt sur le revenu, et d’autre part, le locataire bailleur devra s’acquitter des taxes de séjours.

Enfreindre ces obligations expose les fraudeurs à une sanctions pouvant atteindre plusieurs dizaines de milliers de francs, ainsi que l’interdiction de louer le bien.

Risques et responsabilités

En qualité de locataire bailleur, même s’il exerce de la sous-location, il est le seul responsable en cas de dégâts, de refus de quitter les lieux, ainsi que de non-paiement du loyer. Selon le code des obligations, comme il y a conclusion d’une sous-location, il doit impérativement demander l’accord du propriétaire et de la gérance, sans quoi il encourt une résiliation du contrat de bail.

Malgré la forte croissance du taux d’adoption d’Airbnb, les agences ne reçoivent que rarement des demandes en ce sens. Régulièrement des contrôles sont effectués pour déloger les fraudeurs.

Quelles protections pour les propriétaires ?

D’une part, selon le contrat-cadre romand, le propriétaire dispose d’un délai de 30 jours pour accepter la sous-location de son bien. Ce délai plutôt long permet de presque toujours refuser son introduction sur les plateformes d’économie collaborative.

D’autre part, pour être valide, une sous-location devra toujours être conclue pour une durée déterminée. Or, un locataire bailleur qui sous-louerait son bien fréquemment sur Airbnb ne pourra pas déterminer de délai.

Enfin, si l’annonce comprend des photos de la copropriété sur Airbnb, en avançant un dérangement
de la vie privée des voisins en tant qu’inconvénient majeur, le propriétaire pourra refuser la sous- location.

Une situation stable

Même s’il a récemment été question de favoriser la sous-location répétée de courte durée, le Conseil fédéral a refusé ce projet de révision de l’Ordonnance fédérale sur le bail à loyer et le bail à ferme d’habitations et de locaux commerciaux (OBLF), car il aurait entraîné des désagréments pour les autres habitants des immeubles, et surtout réduit l’offre des logements sur le marché de la location.

Quid des copropriétés ?

Le règlement fait foi

Qu’il soit propriétaire ou locataire, un bailleur qui transmet le code d’accès de l’immeuble à des inconnus peut engendrer des conflits internes ou installer un sentiment d’insécurité.

En effet, il n’est pas rare d’observer des plaintes liées à du va-et-vient dans les couloirs, au non-respect du règlement de maison, et à la présence d’inconnus dans les parties communes. Une personne qui mettrait son appartement sur Airbnb pourrait se voir ainsi interdire la pratique par sa PPE. La décision finale ressort en général du règlement de maison.

L’argument avancé est que la mise en ligne de son appartement sur les plateformes d’économie collaborative constitue un changement de la destination de la copropriété, et exige ainsi l’unanimité de l’assemblée de copropriétaires. Il est ainsi conseillé de modifier son règlement, afin d’interdire un tel usage, si l’on veut préserver le cadre privatif de la propriété, par exemple.

Mesures pour le territoire

Sur un plan de considération plus large, l’ASLOCA souhaite tenir compte de l’aménagement du territoire afin d’éviter que des offres commerciales type Airbnb envahissent des quartiers dédiés au logement dans les endroits touristiques ou les villes en général.